Comportement alimentaire du chien
1. Introduction
Le travail de domestication, commencé il y a 12000 ans ainsi que la sélection des races, ont eu une grande influence sur l’évolution du comportement alimentaire du chien.
Au départ carnivore strict, le régime alimentaire du chien est devenu plus varié au fur et à mesure du temps, probablement au contact de l’homme.
Pour les canidés sauvages, la quantité de nourriture est très irrégulière, c’est pourquoi le chien a une capacité d’ingestion importante. L’accès à la nourriture est hiérarchisé, les dominants mangeant avant les dominés.
Le mélange entre les caractères ancestraux du canidé et la domestication, nous ont donné un chien omnivore, glouton, diurne, prenant de 1 à 3 repas par jour, avec l’aliment qui représente une valeur sociale.
2. Le nourrir en fonction de son étape de vie
2.1. Chiot en croissance
La croissance des chiots est très différente suivant les races. A l’âge adulte, on peut trouver des chihuahuas de 2kg et des saint-bernards qui pèsent plus de 80kg. On comprend donc pourquoi il y une si grande différence de croissance en fonction des races.
Les chiens de grande taille vont avoir une croissance plus longue que les petites races.
Les grandes races ont une croissance en deux phases :
- Une phase de croissance très rapide pendant laquelle se déroule l’essentielle de la croissance du squelette (en moyenne jusqu’à l’âge de 5 mois).
- Une phase de croissance plus lente durant laquelle la musculature se développe.
Le gain de poids quotidien des chiots de grande race est élevé. Les contraintes mécaniques sur le squelette avant que celui-ci ne soit consolidé sont importantes, c’est pour cette raison qu’ils sont souvent victimes d’affections ostéo-articulaires. Afin de limiter au maximum ces affections, il faut absolument envisager tous les apports nutritionnels.
Le besoin énergétique évolue selon la croissance. Il faut donc réadapter régulièrement la quantité de nourriture apportée. Toute erreur nutritionnelle pendant la croissance des chiots de grandes races peut avoir des conséquences graves. Il faut à tout prix éviter une surconsommation énergétique et/ou un déséquilibre minéral.
Pour les chiens de petites races, la période d’allaitement couvre une partie plus importante de la phase de croissance. Toutefois, elle ne la couvre pas entièrement. La période de croissance s’étalant, en moyenne, jusqu’au 6e mois du chiot. Le risque majeur sera une obésité due à la suralimentation, ce qui prédispose à des problèmes de surpoids à l’âge adulte.
Quelque soit la race, les chiots doivent être pesés au minimum tous les mois pour pouvoir adapter la ration.
Il est recommandé de nourrir votre chiot 4 fois par jour jusqu’à ses 3 mois. On passe ensuite à 3 repas journaliers jusqu’à 6 mois pour ensuite diminuer à 1 ou 2 repas quotidiens.
C’est aussi dès cette période qu’il faut commencer à établir des rituels clairs pour le chien. Ceci pour permettre au chiot d’accroitre son sentiment de sécurité et sa maitrise de soi.
Enfin, vous devez savoir qu’au début de leur développement comportemental les chiots manquent d’autocontrôles et n’ont pas de limites. Une bonne acquisition des autocontrôles correspond à la capacité de contrôler son activité motrice, inhiber la force de sa morsure et reconnaitre les signaux de satiété. Au départ, le chiot ne sait pas quand il doit s’arrêter, c’est donc à vous de contrôler la quantité ingérée par votre compagnon.
2.2. Castration/stérilisation
Les besoins énergétiques d’un animal castré sont diminués de 20%. La ration doit être adaptée à ce changement.
2.3. Senior
En vieillissant, il arrive que votre boule poils ait son acuité gustative qui diminue. Son activité physique se réduit (risque d’obésité), ses aptitudes digestives s’atténuent,…
Une alimentation adaptée à son stade de vie senior va aider votre chien à ralentir l’apparition de ces problèmes.
Si la ration « senior » ne suffit plus, votre vétérinaire vous prescrira des croquettes diététiques, adaptées à la pathologie de votre compagnon.
2.4. Gestation/lactation
Une chienne en gestation doit recevoir une alimentation adaptée sur le plan énergétique et protéique, ses besoins étant plus élevés. De la qualité de sa ration, découlera la qualité de son lait. Durant les premières 24-48 heures, la mère produit du colostrum très riche en anticorps ce qui participe à l’immunisation du nouveau-né. Il est donc crucial que les chiots tètent le plus rapidement possible.
Attention, si pour une raison ou une autre vous devez nourrir des chiots au biberon, n’utilisez que le lait adapté à cette espèce. Vous en trouverez chez votre vétérinaire. N’utilisez pas de lait de vache car il contient moins de protéines et plus de glucides que le lait produit par la chienne.
3. Préférences alimentaires
Le passé alimentaire joue un rôle dans l’installation des préférences à l’âge adulte et ce dès la gestation. Les habitudes alimentaires de la mère ainsi que l’alimentation reçue dans les premières semaines de vie du chiot vont déterminer ses préférences gustatives.
La perception du goût peut être modulée par plusieurs facteurs :
- L’âge : la sensibilité gustative décline
- Le sexe : les chiennes sont plus réceptives que les chiens au goût sucré
- L’état de santé : certaines maladies influencent la gustation
- Les médicaments : certaines substances modifient la perception du goût
On a tendance à dire que plus un animal mange varié, mieux il se porte. C’est de l’anthropomorphisme. On n’est pas obligé de changer régulièrement la nourriture de son animal.
Toutefois, en cas de changement d’alimentation, une transition alimentaire d’environ 7 jours est indispensable :
4. Troubles alimentaires
4.1. Anorexie/Hyporexie
Anorexie : absence d’ingestion alimentaire
Hyporexie : ingestion alimentaire diminuée
Il s’agit d’un signe classique d’une maladie physique mais également le symptôme d’une affection comportementale.
L’anorexie et l’hyporexie peuvent être induites par :
- La fièvre
- La douleur
- Toute affection qui atteint le système digestif (diarrhée, vomissement, occlusion intestinale)
- Les affections de la bouche, du pharynx, de l’œsophage
- L’hypothyroïdie
- La dépression
- Certains médicaments
4.2. Boulimie
Le chien est obsédé par la nourriture et engouffre tout ce qui passe à sa portée jusqu’à s’en rendre malade. Trois origines sont possibles :
- Comportement obsessionnel causé par une maladie comportementale (syndrome d’hypersensibilité-hyperactivité dite Hs-Ha, anxiété permanente).
- Faim excessive due à une maladie métabolique (diabète sucré, hypothyroïdie, syndrome de Cushing, certains troubles digestifs, affection du cerveau, parasitose).
- Effet secondaire de certains médicaments (corticoïdes, progestatifs, barbituriques, antihistaminiques, certains antidépresseurs).
Une visite chez votre vétérinaire pourra vous aider à y voir plus clair.
4.3. Pica
Trouble du comportement induisant une ingestion de substances non alimentaires (cailloux, tissus,…).
Cette ingestion de corps étranger est à l’origine d’occlusions intestinales.
Plusieurs contextes favorisent le pica :
- Le chiot, en explorant, a tendance à prendre en gueule tout ce qu’il trouve. Généralement, il va recracher l’objet lorsqu’il se rend compte que ce n’est pas comestible. Si le chiot l’avale, ce sera soit par hasard, soit parce que l’objet a contenu de la nourriture, soit parce que celui-ci est de petite taille.
- Un chien hyperactif risque d’avaler tout ce qu’il peut attraper en gueule, sans faire la distinction entre nourriture et objet.
- Le vol d’objets chez un chien hypothyroïdien avec ingestion est fréquent.
Pris sur le fait, toute ingestion de corps étranger doit être accompagnée d’une visite rapide chez votre vétérinaire.
Si votre chien ne mange plus, vomit, semble abattu et qu’il lui est déjà arrivé d’avaler une substance non alimentaire, consultez rapidement votre vétérinaire, il est possible qu’il ait récidivé !
Petite parenthèse, ne donnez jamais d’os de petits animaux (poulet, lapin,…) à votre chien car celui-ci peut très facilement ingérer l’os. Il risque de se coincer au niveau des voies respiratoires ou bien créer une occlusion intestinale.
En ce qui concerne l’ingestion de matières fécales ou coprophagie, c’est par ici
5. Hiérarchie au moment des repas
Les chiens vivent naturellement en meute. Le chien dominant mange en premier et quand il le souhaite (cas du chien qui ne mange qu’en présence de ses maîtres ou du chien qui mange quelques croquettes puis laisse le reste de sa gamelle pour plus tard). Il est donc primordial que votre chien se rende compte que le dominant, c’est vous.
Le chien qui veut marquer son rang de dominant cherche à être vu dans toutes ses activités et particulièrement quand il mange. L’ordre chronologique dans la prise des repas représente un vrai protocole pour celui-ci. Si le chien mange en même temps que le repas familial, il va supposer qu’il occupe un rang hiérarchique équivalent aux membres de la famille.
Il est conseillé de donner à manger à votre chien après le repas de la famille. Il doit manger sa ration seul. Laissez-lui sa nourriture 20 à 30 minutes.
Bien entendu, ceci ne concerne pas l’eau, qui doit être à disposition à volonté.
Le fait que votre chien ne mange pas en même temps que vous ne va pas le perturber. Il est ainsi en position de dominé et d’individu à protéger.
Petite remarque, certaines personnes pensent qu’il faut retirer régulièrement la gamelle du chien lorsqu’il est en train de manger pour lui faire accepter que ses propriétaires ont le droit de lui retirer ce qu’il tient. A part diminuer la confiance qu’il a pour vous et risquer de le rendre agressif, cela ne sert à rien.
Sachez qu’une mauvaise éducation dans le domaine alimentaire peut avoir des conséquences négatives dans d’autres domaines.
6. La friandise
La nourriture est souvent perçue comme le moyen le plus facile d’entrer en contact avec l’animal. Cependant, la friandise devrait plutôt être utilisée comme une récompense plutôt que comme un cadeau. Celle-ci doit se mériter pour éviter un problème de communication.
La récompense alimentaire est un agent du renforcement positif.
La friandise ne doit pas être donnée au chien parce que l’on se sent coupable, par exemple parce qu’il est seul longtemps à la maison.
N’oubliez pas de calculer la ration quotidienne de votre chien en tenant compte des friandises qu’il a reçues.
7. L’animal malade
Un animal malade verra parfois sa ration adaptée en fonction de sa pathologie et du stade de sa maladie.
8. Points clés
- Une alimentation équilibrée joue un rôle de prévention dans la santé du chien.
- En cas de maladie, une alimentation adaptée peut-être mise en place.
- A chaque étape de vie son alimentation.
- La hiérarchisation au moment des repas aidera le chien à trouver sa place au sein de la famille.
- Ne donnez pas à manger à votre chien quand vous êtes à table.
N. Beukelaers - Assistante vétérinaire